Les Chants de Nihil
Armor



1. La Crue

Effluve accrue au creux du lit
Du fleuve en crue... je me languis,
Lape une eau claire au bain fleuri,
Étreins ses flancs dès qu'elle frémit.

Bougre de bourge à l'air retors,
Sème le vent et moi les spores,
Tiens fort la barre, je monte à bord
Et te ferai labour à mort.

Du flux âcre aux abysses roses,
La houle tout mon membre arrose
Et le souffle fouette les toiles.

Râle obscène, chant de sirène,
Résonne quand pulse ma veine
À m'en hérisser tous les poils !


2. Comme une sale envie

Un réveil... seul encore en vie
Dans une salle peu commune
Aux murs couverts des armoiries
Des pays sans couleur aucune.

Contre le sol au goût salé,
Des coprophages la tribune,
Société sale à satiété
Blottie dans la fosse commune

Génocidée par mon génie ?
Je n'étais que, pour ma survie...

De ton pistil l'humble bourdon,
De tes épanchements le drain,
De toutes tes brèches le joint,
De ton goulot le fier bouchon.

Monolithe d'un terrain vague
Sur lequel n'oses t'adosser,
Chienne longeant les barbelés
M'asservissant en ton goulag.

Au pantin à son effigie :
Un feu comme elle-seule en vit !

Brasier de ma stase nerveuse,
Le tison câline à foison.
Comme le baiser du chardon,
Du chaton, la langue râpeuse.

Devenu pèlerin belliqueux
M'est apparu sur la lagune
Le saint patron de la rancune
Qui m'a dit : « je t'exhausse un vœu »

J'avais comme une sale envie...


3. Lune rousse

Bouille de neige et de mystères
Aux mirettes couleur de prune ;
Sans-voix lactée qu'éclaboussèrent
Quelques gènes d'étoiles brunes.

Alors que je nous imagine
Au bois où les humus et mousses
S'émoustillent sous la pluie fine
Et la pesante Lune rousse,

Dans ce torrent aux reflets cuivres
Je plonge une main clandestine,
Caresse l'Automne où s'enivre
Plus bas ta gorge blanche hermine.

Alors que je nous imagine
Au bois où les humus et mousses
S'émoustillent sous la pluie fine
Et la pesante Lune rousse,

Me taquinent ces éclats d'ambre
Et ces parfums que je devine
Se disperser quand tu te cambres
Puis te rétractes sous l'épine.


4. Roule et enrôle

Enfants de pluie plus que de putes
Sous la rosée effarouchés
Ressuscitant de leur nuitée
La papille et le crin hirsutes

Ça, ma boutanche qui s'épanche !
Une loche à même le corps !
Le cul terreux, comme un pécore,
Né de feuilles en avalanches.

Plie les gaules, roule et enrôle,
Et racole dès que ça miaule...
Quand le grain fait ployer le saule,
Toujours l'alcool pleut en Paimpol !

Aux lendemains hypothétiques
Entre Danube et mer Baltique !
Et toi l'ami, fardeau d'un soir,
Demain portera mon brancard.

Vieux cons du vieux continent
Sous un ciel d'étoiles d'anis
Marions pivo-slivovice
Pour mieux reprendre le volant

Placide et froid comme un hibou
Abandonné jusqu'à trop tard :
Mes yeux, brûlés par quelques phares
Creusent leur tombe dans mes joues.


5. Là où nous étions les rois

Là où nous étions les rois,
Du temps s'est abattu le voile.
Oui, là où nous étions les rois,
Se sont résorbées les étoiles

Dans une nuit d'où ne reluit
Plus un sourire, plus une goutte,
Qui ne berce plus aucun cri
Là où les souvenirs me coûtent...

Où nous étions frères, je crois,
La bière ne se laiss' plus boire.
Le long de ce bon vieux trottoir
Qui ne tolère plus mes pas...

Jusqu'à la lisière du bois
Dont le sol draina nos urines
Et où, perchés sur une ruine,
Braillions à s'en rompre la voix.

À en faire pâlir les corbeaux,
À leur en décoller les plumes
Et nous tenions tête à la Lune
Qui capitulerait bientôt !

Là où nous étions les rois...

Danse où se mêlent dans le froid
Embruns et grains incandescents,
Fluctue aux accords innocents
D'une jeunesse qui échoit.
La guitare taillait nos doigts,
La vallée, léchée par le vent,
S'offrait dans un râle indécent
Là où nous étions les rois.


6. Rideau de chair

Ovation sur la scène :
De ta chair le rideau
S'ouvre sur un Éden

Corps de sueur perlé
Que je bats, indocile,
De tes hanches graciles
Se décolle une ondée

Consacré sur la scène
De la candeur, m'égare
De rêve en abdomen...

Siècle qui nous réclame,
Sentence sans appel,
Tel une pluie de sel
A desséché les âmes

Putain parmi les putes
J'enfonce dans la fange
Où s'étreignent les brutes
Et se saignent les anges


7. Les Bois innervés

[prologue]
Nous étions une paire d'âmes :
le Père... et sa Dame,
Silence de mise, en éclaireuse éclairée,
S'élançant dans des nuées
De prédateurs et de proies en suspens.

* * *

Pour nous déstructurer au mordant de la bruine,
Une dernière fois s'inonder de malice
En ces bois dont les jeux ancestraux de racines
Rident le marigot comme autant de varices.

Échassier d'émail pâle amorçant la descente
Loin des monts de jeunesse aux sommets d'anarchies.
Je t'emboîte le pas, ta langue véhémente,
Et maintenant tes flancs d'ineffable inertie.

Sangsues et taons nous tètent et je tête le temps.
Ne comptant plus les champs, les landes, les hectares
D'aventures franchis, d'où mes espoirs nourris
Dans ton ventre d'opale expulsent leur nectar.

* * *

[epilogue]
De ton être ne subsiste qu'un bijou nacré
Voguant sur la marée noire,
Alors que nos muscles battent ensembles
Ton asphyxie et ma délivrance.


8. Aux flambeaux

instrumental

Lyrics in plain text format



Main Page Bands Page Links Statistics Trading list Forum Email Zenial